jeudi 14 août 2008

Ce n'est pas le courage qui nous étouffe...

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Ce n’est pas le courage qui nous étouffe…
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On s’est un peu moqué de nous, au début, lorsque nous parlions de troisième guerre mondiale à propos de la guerre dite « froide » malgré ses 100 millions de morts. On s’est également un peu moqué de nous, au début, lorsque nous parlions de quatrième guerre mondiale à propos de l’islam radical. Les analyses parues durant la seule journée d’hier mercredi 13 août 2008 - celles de Hélène Carrère d'Encausse, Hélène David, Martin Birnbaum et Laurent Murawiec - analyses tantôt mentionnées, tantôt citées ci-dessous, tendent à démontrer qu’il s’agit bien de guerres mondiales, et que de surcroît, la troisième renaît, tandis que la quatrième est loin d’être terminée. Il est probable que l’on parvienne à calmer le jeu - russe - en Géorgie. Il est même probable que pour le calmer un peu il nous faille céder beaucoup. A vrai dire, depuis des générations, c’est à peu près tout ce que nous savons faire, les Américains étant parfois un peu plus courageux que les Européens, raison pour laquelle d’ailleurs les Européens - totalement dépourvus de gratitude et de reconnaissance - se déclarent anti-américains. La rumeur a circulé entre mardi et mercredi que nous céderions la Géorgie à la Russie et qu’en contrepartie la Russie nous laisserait en finir avec le nucléaire offensif iranien. Aujourd’hui jeudi on a plutôt le sentiment que nous allons céder la Géorgie à la Russie et qu’en contrepartie la Russie ne cèdera sur rien du tout et surtout pas sur l’Iran. L’Iran qui renforce ses liens avec la Turquie tandis que nos dirigeants gesticulent quelque part entre Pékin, Tbilissi, Fort de Brégançon et la plage. Les Européens nous voulons le pétrole, le gaz et la paix. Sur le très court terme nous pourrions obtenir les trois. Mais au-delà nous risquons tout perdre, le baril, la bombonne, la tranquillité et même un peu notre âme.
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Or donc, sur lefigaro.fr, hier mercredi 13 août 2008 à 22:22, dans un article intitulé « Le retour de la Russie sur la scène internationale » écrit par Hélène Carrère d'Encausse, de l’Académie française, on peut notamment lire : « Si, moralement, la Russie a quelque peu perdu à déployer sa force, politiquement elle a gagné sur deux tableaux. À terme, elle a montré que son appui pouvait aider des peuples à disposer de leur destin, alors qu'il y a quelques mois, à peine, la reconnaissance de l'indépen­dance du Kosovo contre sa volonté semblait démontrer le contraire. Elle a aussi affaibli la Géorgie, non seulement militairement mais sur le plan international, diminué ses chances d'entrer rapidement dans l'Otan, et par là, mis un frein à l'éviction russe programmée du Caucase du Sud. Ce qui n'était pas la moindre de ses préoccupations. Cette guerre confirme, en définitive, le retour de la Russie sur la scène internationale, une Russie sûre d'elle-même, affichant ses intérêts nationaux sans complexe et, c'est nouveau, l'acceptation par la communauté des nations de traiter avec cette Russie-là et non avec un État diminué. Saakachvili, dans son projet fou de défier la Russie, lui aura rendu probablement le plus grand des services qu'elle ait connus au cours de ces dernières années ».
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Dans un article intitulé « Géorgie - Russie : Sous les obus, le pétrole », Hélène David pour Guysen International News, écrit notamment, hier mercredi 13 août 2008 à 22:52 : «…la situation pourrait rester tendue tant les enjeux économiques et stratégiques sont importants. Qu'il s'agisse de la Géorgie, de la Russie ou de l'Europe, il est dans cette affaire davantage question d'intérêts et de pouvoir que de frontières et d'intégrité territoriale… La visite du Président français Nicolas Sarkozy en Russie puis en Géorgie a mené mardi 12 août à un plan de paix entre les deux pays. Ce plan, qui doit encore être signé par les deux parties et avalisé par les ministres des Affaires étrangères de l'Union Européenne, prévoit la cessation des affrontements selon six points : le non recours à la force, la cessation définitive des hostilités, l'accès à l'aide humanitaire, le retour des forces géorgiennes à leurs cantonnements antérieurs, le retrait russe et l'ouverture de discussions internationales sur le statut futur de l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie. C'est ce dernier point qui porte à débat puisqu'il remet en cause l'intégrité territoriale de la Géorgie, les provinces d'Ossétie du Sud et d'Abkhazie, étant officiellement - et malgré leurs aspirations indépendantistes - des territoires géorgiens. (…) Il va sans dire que les questions énergétiques ont une place non négligeable dans la compréhension de la suite des événements et prises de positions diplomatiques. Le Caucase dans son ensemble est une région stratégique dans l'acheminement des ressources pétrolières et gazifières d'Asie Centrale vers l'Europe. Si la Russie, grâce à l'immensité de son territoire, contrôle une majeure partie des pipelines et des exportations, la Géorgie est elle aussi un pays de transit important. Du moins l'était-elle jusqu'à ce que ses ports soient la cible des bombardements russes ces derniers jours. En 2006, des pétroliers européens tels que BP ou Shell ont financé la construction d'un pipe-line passant par la Géorgie. L'idée : contourner le quasi monopole de la Russie et, en instaurant une indépendance très relative, limiter la progression de sa puissance. (…) L'Union Européenne quant à elle, par la voix du président du Conseil en exercice Nicolas Sarkozy, est intervenue dans la gestion du conflit avec une rapidité déconcertante. Le but : préserver dans la région, un interlocuteur autre que la puissante Russie et entretenir avec la Géorgie des relations économiques qui mettent l'Europe à l'abri d'une dépendance envers la Russie. (…) La Russie cherche-t-elle pour autant, comme le prétend la Géorgie, à prendre le contrôle de ces provinces indépendantistes ? Si tel est le cas, la communauté internationale ne pourra rester sans mot dire, dépendance énergétique ou pas… ».
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En outre, toujours à propos de la Géorgie et la Russie, je ne peux qu’encourager vivement les lectrices et lecteurs à lire également l’excellent article d’hier mercredi 13 août 2008 de Martin Birnbaum écrit pour LibertyVox sous le titre « Requiem pour la Géorgie » et l’article tout aussi excellent intitulé « Mourir pour Tbilissi ? » écrit par Laurent Murawiec à Washington pour Metula News Agency, article également daté d’hier mercredi 13 août.
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Mais les médias ne sont pas les seuls à aborder ce délicat sujet. Ainsi, aujourd’hui jeudi 14 août 2008 à 11:45, l’
European Strategic Intelligence & Security Center informe que « selon le ministère géorgien de l'Intérieur, la Russie a commencé ce jeudi à rendre le contrôle de la ville de Gori et des villages avoisinants à la police géorgienne. Le général Vyacheslav Boriso, qui coordonne le transfert d’autorité dans la région, a toutefois déclaré que les troupes russes pourraient encore rester quelques jours à Gori, pour ‘enlever des armes abandonnées, et participer à la restauration de la loi et de l’ordre’. (…) la compagnie pétrolière britannique British Petroleum (BP) a toutefois annoncé avoir recommencé à pomper du gaz dans le gazoduc Caucase Sud (SCP), qui avait été provisoirement fermé pendant l’intervention militaire russe. Selon le groupe, les livraisons se sont toutefois poursuivies pendant cette période, grâce au gaz déjà présent dans l’infrastructure, qui relie le champ gazier de Shah Deniz, en Azerbaïdjan, à la Turquie et aux marchés occidentaux ».
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Puis on apprend sur tf1.lci.fr/infos à 11:54 que les présidents des républiques géorgiennes séparatistes d'Abkhazie et d'Ossétie du sud ont été reçus au Kremlin par le président russe. Et à 12:05 que les forces russes détruisent la ville de Gori, près de la république séparatiste d'Ossétie du Sud, et le port de Poti, selon les autorités de Géorgie.
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A 12:45 l’AFP raconte que « Les forces russes étaient toujours postées jeudi à Gori, où des explosions ont retenti, et sont retournées au port géorgien de Poti, selon Tbilissi, remettant en cause le fragile cessez-le-feu en vigueur depuis deux jours. Une série d'explosions ont été entendues et de la fumée se dégageait à la mi-journée autour de Gori, principale ville géorgienne près de la république séparatiste d'Ossétie du Sud, a constaté un journaliste de l'AFP. Il semblait s'agir de tirs d'artillerie. Juste auparavant, un soldat russe avait demandé aux journalistes de quitter les lieux et tiré des coups de feu en l'air. Les forces armées russes sont de retour dans le port géorgien de Poti (ouest) et ont accru leur présence à Gori, en dépit de l'accord de cessez-le-feu, a affirmé à l'AFP un porte-parole du ministère géorgien des Affaires étrangères. (…) Au même moment, un photographe de l'AFP a vu 15 à 20 blindés géorgiens de transport de troupes, qui venaient de franchir un check-point de la police en direction de Gori, s'arrêter sur le bas-côté à 30 km de la ville ».
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A 12:58 on apprend sur Guysen.International.News que « pour le chef de la diplomatie russe, l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie n'accepteront plus de faire partie de la Géorgie. ‘Le monde doit oublier l'intégrité territoriale de la Géorgie’, a ajouté Sergueï Lavrov ».
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A 13:33 Reuters informe que « des chars d'assaut russes sont entrés dans la ville portuaire géorgienne de Poti, escortant des camions de transport de troupes vers le port (…) Le capitaine du port de Poti a déclaré que les troupes russes avaient coulé six vedettes géorgiennes, sans doute à l'aide d'explosifs, après avoir averti les badauds de rester à l'écart ».
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A 16:49 on apprend sur Guysen.International.News que c’est le début des entretiens de Condoleezza Rice avec Nicolas Sarkozy. Que la secrétaire d'Etat américaine est arrivée jeudi après-midi au Fort de Brégançon (sud-est de la France). Que le chef de la diplomatie français Bernard Kouchner participe également à cette rencontre. Que près d'une semaine après le début du conflit entre Tbilissi et Moscou, ce déplacement marque la « volonté des Etats-Unis de reprendre la main ». Mais à 17:08 - soit 19 minutes plus tard - on apprend, toujours sur Guysen.International.News, que les « présidents » des républiques séparatistes d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud ont tenu une conférence de presse commune au cours de laquelle ils ont affirmé leur détermination à obtenir l'indépendance. Est-il besoin de préciser : avec la bénédiction de la Russie qui apparemment se fiche de la volonté des Etats-Unis de reprendre la main - à Fort de Brégançon - avec Sarkozy et Kouchner ?
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Miguel Garroté
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